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Le mystère de la danse de saint Guy

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Le mystère de la danse de saint Guy

Au fil des siècles, plusieurs scénarios ont été avancés pour expliquer ce phénomène : ergotisme (empoisonnement par du seigle contaminé par une mycotoxine), culte hérétique, possession démoniaque, ou encore hystérie collective.

Strasbourg, été 1518. Dans les rues étroites de la ville et sur les places, des dizaines de personnes dansent frénétiquement au rythme de tambourins, violes et cornemuses.

Mais l’atmosphère n’a rien de festif. Les scènes sont même « terrifiantes »

Les femmes, hommes et enfants atteints de cette étrange « manie dansante » crient, implorent de l’aide, mais ne peuvent s’arrêter. Ils sont en transe. Ils ont « le regard vague ; le visage tourné vers le ciel .

Jusqu’à quinze danseurs succomberont chaque jour, selon un témoin de l’époque, victimes de déshydratation ou d’accidents cardio-vasculaires.

Avant de lire l’ article complet, je vous propose cette vidéo.

LA VIDEO

1518 : L’Épidémie de danse mortelle de Frau Troffea à Strasbourg


Nous sommes il y a exactement 500 ans, le vendredi 12 de juillet, en l’an de grâce 1518.
Ce jour-là, une coquette habitante de Strasbourg, Frau Troffea sortit dans les rues de la ville et se mit à danser encore, encore, et encore. Sans que l’on sache pourquoi, elle dansa quasiment sans interruption pendant des jours !

Ceci aurait pu s’arrêter là et nous n’aurions jamais entendu parler de cette gente dame. Cependant, cette dernière est à l’origine de l’un des plus célèbres cas de peste dansante. Cette peste eut lieu bien avant que les Strasbourgeois n’aillent danser sans raison apparente au Gold Club de Kehl ou à la Salamandre (on apprendra plus tard que du rhum de piètre qualité et du coca sans bulles en étaient la cause).

Bref. Au bout d’une semaine, il est avéré que 34 personnes se joignirent à elle. Au bout d’un mois, près de 400 ! Jusqu’ici, tout va bien: On danse, on rigole. Sauf qu’ au fur et à mesure que les gens dansaient sans s’arrêter, certains tombaient raide mort d’épuisement. D’autres avaient des visages horrifiés, les pieds ensanglantés.

Épidémie de danse Strasbourg 1518 Frau Troffea

Les religieux prétendirent que les sujets étaient possédés par un mal divin, la danse de Saint-Guy (ou Saint-Vitus). De l’autre côté, des médecins émettent la théorie d’une maladie naturelle, causée par un sang trop chaud. D’après-eux, la seule solution de guérison est de les faire danser encore plus. Suffisamment inquiètes, les autorités décident alors d’installer une scène en bois place Broglie, et d’y assigner des musiciens. (bien plus tard, Jack Lang aurait eu une idée similaire).

Épidémie de danse Strasbourg 1518 Frau Troffea

Et bien il n’en fut rien ! Les danseurs devinrent encore plus agités, et encore plus de monde se joignit à la folle danse. Certains furent conduit à la ‘Vitsgrotte’ à Saverne. Il semblerait que ce pèlerinage en aurait calmé quelques-uns, mais n’aurait pas suffi à mettre un terme à la teuf qui se tenait à Strasbourg.
L’épidémie de peste dansante de 1518 termina tout comme elle avait commencé, sans nulle raison, en septembre de la même année.
Des sources plus ou moins avérées attestent que jusqu’à quinze personnes décédaient par jour durant le mois d’août !

Épidémie de danse Strasbourg 1518 Frau Troffea

Explications contemporaines

Les histoires divines, c’est sympa quand Tom Hanks cherche le Saint Graal dans le Bois de Boulogne, mais un peu de sérieux je vous prie. Le cas de Strasbourg est relativement célèbre, au point que John Waller, un historien américain, en a fait un bouquin paru en 2008 : A time to dance, a time to die : the dancing plague of 1518.

Les théories d’aujourd’hui pour expliquer cette fameuse peste sont les suivantes :Rituel extatique
Selon Robert Bartholomew (sociologue à l’université James Cook de Townsville en Australie), les épisodes de pestes dansantes seraient le fruit de rituelsL’ergot du seigle
A cette époque, il était fréquent de manger du pain vieux de plusieurs jours. En utilisant de la farine de blé ou de seigle, ceci permettait à un champignon (l’ergot du seigle) de se développer.
Sans rentrer dans trop de détails, ce champignon contient notamment des molécules (alcaloïdes) dont dérive le LSD. Je pense que je n’ai pas besoin d’en dire plus.Hystérie collective
La théorie de l’ergotisme n’est pas suffisante et est démentie par certains (en particulier John Waller), qui évoquent simplement un phénomène d’hystérie collective.
En effet, les conditions de vie de l’époque ; la pauvreté, la famine, la peur des autorités, auraient conduit certains habitants à la folie.
Si vous kiffez les histoires glauques, notre chère et tendre Frau Troffea aurait jeté son nourisson depuis le Pont du Corbeau avant de commencer les festivités.
Un peu plus trippant, l’épidémie de fou rire du Tanganyika en Tanzanie est l’un des plus récent cas d’hystérie collective. En 1962 cent à deux cents adolescents ont ri jusqu’à en pleurer pendant plusieurs semaines, au point de fermer certaines écoles.

Autres cas de peste dansante
Le cas de Strasbourg a notamment été documenté par Paracelse, un médecin suisse.
Avec plus ou moins de sources, on peut aussi trouver les dates suivantes :
– 1237 Erfurt, Allemagne
– 1374 Aachen (Aix-la-Chapelle), Allemagne
– 1463, Metz
– 1863, Madagascar

Et pour les curieux
Le prénom de madame n’était pas Frau. Frau signifie Madame, en allemand. Et oui, Strasbourg faisait partie du Saint Empire Romain Germanique (#SARG) à cette époque, et il fallut attendre le Roi-Soleil en 1681 avant qu’elle ne devienne française.
Un petit groupe de post-punk ricain (de Spokane dans l’état de Washington) s’est simplement nommé ‘The Dancing Plague of 1518’.
Enfin, vous pouvez aussi chercher sur le net le cas d’ergot du seigle de Pont-Saint-Esprit de 1951. Sept morts et cinquante personnes internées à cause du ‘pain maudit’.

Épidémie de danse Strasbourg 1518 Frau Troffea